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Lapoutroie

Depuis 250 ans, LAPOUTROIE possède des armoiries représentant un pont en or sur lequel se tient une oie argentée avec bec et pattes en or. Cet emblème rappellerait le nom de la cité, « poutre-oie » ou l’oie sur la poutre. Les noms allemands, Sconerloch, Schoenerlach, Schnierlach, rappellent les temps où à l’endroit du village se trouvaient d’énormes aulnes.

Ces armoiries datent de la fin du XVII° siècle (Armorial général de France). Ce sont des armoiries parlantes fondées sur une explication populaire du nom de la commune : une oie sur une poutre remplacée ici par un pont

En réalité, Lapoutroie vient de Lè Putray : lieu boueux, marécageux

  • Nom Français
    Lapoutroie
  • Nom Patois
    Lè Poutray
  • Nom Allemand
    Schnierlach
Premières mentions
  • 1ère moitié
    du XII° siècle
    Sconerloch (bosquet d’aulnes)
    Première mention germanique
  • 1288
    Lai Poitraie
    Première mention romane
  • Nom Français
    Hachimette
  • Nom Patois
    Ètchimèt
  • Nom Allemand
    Eschelmeer
Premières mentions
  • 1241
    Eschenmoor, du germanique marais de frênes
    Première mention germanique
  • 1441
    Eschelmore
    Première mention romane
  • 1698
    Ètchimèt
    Première mention romane
  • Superficie
    21,12 km2
  • Population en 1999
    2104 habitants
  • Population en 2018
    1885 habitants
  • Densité
    99,6 habitants/km2
  • Altitude minimum
    329 m
  • Altitude maximum
    1221 m
  • Dénivelé
    892 m
  • Latitude
    77° 10' 13"Est
  • Longitude
    7° 06' 51" Est

Histoire de Lapoutroie

Comme dans beaucoup d’autres cas, l’origine du village ne peut être établie avec certitude. Il semblerait qu’à l’époque Celte, se trouvait là, un village charbonnier. Il avait été élevé au bord de la route qui joignait Vieux Brisach au Col du Bonhomme.

Les romains ont envahi l'Alsace venant du Sud de la France. Ils construisirent un chemin rural reliant Ribeaugoutte à la grande route, en débouchant sur celle-ci au niveau du Coq Hardi. D'ailleurs, ce chemin s'appelle encore aujourd'hui "Chemin des Romains".

Les Alamans, dont on retrouve la trace sur le Main dès le début du IIIe siècle envahissent l’Alsace à partir de 233-234. En 406-407, le système défensif Romain s’effondre et l’Alsace passe dans leurs mains.

L’Alsace devient un pays germanique. On admet, cependant, que quelques peuplades gallo-romaines se soient maintenues au fond de la vallée de la Weiss. La victoire des Francs sur les Alamans en 496, va leur permettre d’occuper une partie de l’Alsace.

En 842, à l’occasion du serment de Strasbourg, Louis le Germanique et Charles le Chauve s’allient contre leur frère Lothaire. Ce traité est important, car il jette les bases de la séparation linguistique qui jouera plus tard un rôle important dans l’histoire de l’Alsace. En effet, le serment est rédigé dans la langue vulgaire. Les partisans de Louis prêtent serment en tudesque (l’ancêtre de l’Allemand) tandis que les soldats de Charles le prononcent en roman (ancêtre du Français). A ce moment là, Lapoutroie qui apparaît sous le nom de Sconerloch fait partie du royaume de Lothaire.
Entre les Alamans et les Francs, se trouvait une vaste étendue boisée et inhabitée des Vosges qui maintenait la séparation des langues. L’Alsace devient ainsi un pays de langue germanique où l’on parle un dialecte alémanique jusqu’à la crête des Vosges à l’exception de quelques vallées vosgiennes, dont celle de la Weiss où subsiste un dialecte roman ou français.

En 1079, l’empereur Henri IV donne à Frédéric de Hohenstauffen, le duché de Souabe (Forêt Noire actuelle) qui sera augmenté en 1116 du duché d’Alsace. Les Hohenstauffen règneront donc sur notre région à partir de ce moment-là.

Pour faire régner la paix, l’empereur doit compter avec les grands seigneurs de la région. Quand il ne peut pas les soumettre par la force, il doit leur faire d’importantes concessions. La région, comme toute la moyenne Alsace passe sous tutelle des comtes d’Eguisheim qui appartiennent à l’aristocratie impériale jusqu’en 1225.
C’est ainsi que le comte d’Eguisheim fonde le couvent de Sainte-Croix-En-Plaine en 1005. A cette occasion, le couvent reçoit des biens dans la vallée d’Orbey. C’est à cette époque que les vallées sont colonisées et que les terres nouvelles sont défrichées. La montagne, moins peuplée que la plaine, s’adonne à l’élevage en particulier sur les chaumes. Faute de pouvoir conserver le lait, on invente alors le fromage de Munster. La forêt est une richesse convoitée.

En 1047, un document fait état de Lapoutroie comme faisant partie des possessions du Couvent de Sainte-Croix-En-Plaine, fondé par les parents du pape Léon IX.
Les Ribeaupierre, installés à Ribeauvillé firent le siège du château du Hohnack en 1279 et 1288 et s’en emparèrent.

D’après un document daté de l’année 1348, le village s’appelait La Poutroye. Dès cette époque, il se distinguait comme centre politique de toute la région. En effet, le représentant des Seigneurs de Ribeaupierre y habitait. Il s’y trouvait aussi un tribunal et une prison. Des criminels furent pendus à Hachimette. Le gibet était érigé sur un pré en face de la chapelle, l’endroit porte encore aujourd’hui le nom de pré du gibet.

Durant le moyen-âge, l’agriculture reste la base de la vie économique du pays. Vie difficile, souvent perturbée par de nombreux troubles. La fragilité de la vie provoque de fréquentes disettes, parfois des famines. Mal nourris, vivant souvent dans des conditions d’hygiène très précaire, les habitants sont d’autant plus sensibles aux vagues d’épidémie. Entre 1347 et 1350, la peste noire fauche plus du tiers de la population. En 1385 et 1386 la famine en fait autant. A cela s’ajoutent d’autres catastrophes entre 1358 et 1381. Guerres privées entre seigneurs locaux, maintes querelles entre les seigneurs de Ribeaupièrre et les ducs de Lorraine.

Dès 1493, puis à plusieurs reprises les paysans se sont révoltés contre les seigneurs. Le lundi de Pâques, 17 avril 1525 se produit un soulèvement général, 30 à 40 000 hommes se mobilisent dans toute l’Alsace derrière Erasme Gerber. Ils s’attaquent surtout aux monastères pour assurer leur ravitaillement. Avec l’aide des habitants ils s’emparent de quelques villes comme Kaysersberg ou Ribeauvillé.
Encouragé par une partie des seigneurs Alsaciens, le Duc Antoine de Lorraine, pénètre en Alsace avec une forte armée. Des milliers de paysans sont massacrés. La résistance est brisée. La répression est partout très lourde, néanmoins, les paysans réussissent à conserver leurs droits, leurs coutumes et leur organisation villageoise.

1618 marque le début de la guerre de trente ans qui a opposé catholiques et protestants et qui atteindra l’Alsace en 1621. Dans une région comme le val d’Orbey restée profondément catholique ce sera la terreur et la misère.
Au début du 16ème siècle, LAPOUTROIE comptait environ 700 habitants. Pendant la guerre de trente ans (vers 1632), on en dénombrait encore 206. En 1681, il ne restait que 36 habitants occupant alors 30 maisons. A Hachimette, on comptabilisait 10 habitants pour 8 maisons, à La Goutte, 9 habitants et 5 maisons, à Ribeaugoutte, 27 habitants et 22 maisons.
A cette époque (1681), Ribeaugoutte fut presque totalement détruit par un incendie qui ravagea en 2 heures, 18 maisons.

A partir du 18ème siècle, la population s’est considérablement accrue. En 1732, 876 habitants occupaient les lieux. Peu de temps après, Lapoutroie connut le même sort que Ribeaugoutte : le 2 septembre 1750, entre 16 heures et 17 heures, la foudre tomba sur une maison près de l’Eglise ; elle fut détruite ainsi que 22 maisons du voisinage.

L’église Ste-Odile

L’église datait de 1502. Par des dons en espèces, les habitants contribuaient à l’achèvement de l’édifice. Le Seigneur de Ribeaupierre autorisa le curé Trützer à organiser des collectes pour l’achat de cloches et des ornements d’église. En 1730, la vieille église subit des transformations et resta maintenue dans cette forme jusqu’en 1912, année au cours de laquelle l’église actuelle fut érigée. Les frais de transformation s’élevaient à 2570 livres pour le gros oeuvre et à 385 livres pour la toiture. Les habitants fournirent gratuitement les matériaux et les livrèrent sur le chantier de construction.
Avec les trois cloches détruites par l’incendie, on en coula 2 nouvelles : la première (1900 livres) fut baptisée Ste-Odile et la seconde (1900 livres) Marie-Sébastien. On en adjoignit deux autres : Marguerite (1500 livres) et Anna Joseph (318 livres). L’évêque de Bâle ayant un empêchement, ce fut le curé BURGER de LAPOUTROIE qui procéda à la bénédiction de ces cloches. A ces détails, il y a lieu d’ajouter que l’intendant de STRASBOURG a ordonné aux communes d’Ammerschwihr, de Kientzheim, de Sigolsheim et de Munster, de fournir 500 chênes et 1050 sapins, prélevés dans leur forêt respective pour la construction de l’église et des maisons incendiées

L’église actuelle fut consacrée le 3 Octobre 1912 par l’évêque de STRASBOURG Zorn Von Bulach. Les frais de construction s’élevaient à 280 000 Marks. Pendant la guerre 1914/1918, l’Eglise subit plusieurs dommages. Elle fut atteinte par une dizaine d’obus dont l’un détruisit la voûte du choeur. La statue de Ste-Odile resta intacte. Un début d’incendie a pu être maîtrisé.

Lapoutroie au XIX° et XX° siècle

Du temps de la grande révolution, LAPOUTROIE comptait 1928 habitants. Pour peu de temps la paroisse Le Bonhomme fut administrée par LAPOUTROIE. Hachimette fut rattachée à Aubure, puis se libéra et se rattacha à nouveau à LAPOUTROIE. Ribeaugoutte érigea en 1762 une chapelle dédiée à St-Laurent.

Lorsque Napoléon 1er procéda en 1796 à une réorganisation administrative de la France, Lapoutroie devint chef lieu de canton et obtint le droit de tenir le marché chaque semaine. A la même époque, la commune fit l’acquisition d’un grand domaine forestier et construisit une salle de police. Par la suite, le développement de la commune s’accentua de plus en plus pour atteindre, il y a quelques 150 ans, 3206 habitants. Actuellement, on ne compte plus que 2156 habitants pour ce village.

Le samedi 1er août 1914 l’ordre de mobilisation générale est affiché. Le 07 août, les Français, dans une grande offensive pénètrent en Alsace, se rendent maîtres des principaux cols et descendent dans la vallée où ils occupent Mulhouse, Colmar, Munster. Dans la vallée de la Weiss, leur avance ira jusqu’à Kaysersberg. L’offensive Allemande à travers la Belgique va obliger les troupes Françaises à se replier. Le front se stabilise alors sur les sommets vosgiens.

Dans la région, le Linge et la Tête des Faux qui contrôle les passages du col des Bagenelles et du Col du Bonhomme seront âprement disputés. A partir de 1915, le front des Vosges sera plus calme et le restera jusqu’en 1918.
Après l’armistice du 11 novembre 1918, le Français devient langue unique à l’école.

La défaite de l’armée Française en mai-juin 1940 permet à Hitler de mettre la main sur les deux départements Alsaciens et sur la Moselle. Dès les premières semaines, les nouveaux maîtres tentent de supprimer toute trace de l’influence Française pour faire de l’Alsace une terre Allemande. Devant le peu d’enthousiasme de la population, de nombreux alsaciens seront expulsés. Pour 100 000 d’entre eux, l’épreuve la plus douloureuse arrive à partir d’août 1942. Les jeunes hommes nés à partir de 1907 et jusqu’en 1928-29 sont obligés d’effectuer leur service militaire dans l’armée du Reich. Ils seront essentiellement envoyés sur le front Russe. Certains tenteront d’échapper à l’incorporation, d’autres s’évaderont, la répression sera à chaque fois terrible. Beaucoup ne reviendront pas du front.

Après d’âpres combats Hachimette sera libéré le 7 décembre 1944, le 8 décembre 1944 c’est au tour de Lapoutroie. Jusqu’au 15 décembre, des combats d’une violence extrême se déroulent vers La goutte, les Mérelles, le Faudé par la prise du col de Bermont. Finalement le col cédera le 15 décembre au soir entraînant la libération d’Orbey le lendemain. Tout le territoire communal n’est cependant pas encore libéré, Bâche-le-Loup sera libéré le 17 décembre et le Limbach le 21 décembre. Trois jours plus tard, les civils fêtent leur premier Noël de paix depuis 5 ans.